29/05/2020
Emmanuel Mbessé le sibyllin
Emmanuel Mbessé, "L’écart fertile. Conversation avec Emmanuel Mbessé", (avec Françoise Jaunin), coll. Conversations, art&fiction, Lausanne, 2020.
Né à Lausanne d’une mère suisse et d’un père congolais l'artiste a découvert le pays paternel africain lors de plusieurs voyages au cours son enfance. Il débute sa vie professionnelle par un apprentissage d’ébéniste avant de rejoindre à l’ECAL et d'y obtenir son diplôme. Il cofonde avec Arnault Weber et Camille Blin la "ACE Furniture Company" qui se remarque par l'épure de création en frêne clair. Le trio reçoit plusieurs distinctions et leurs travaux sont exposés au Salon du meuble de Milan et figurent dans les collections du Museum für Gestaltung de Zurich et du Mudac de Lausanne.
Mbessé renonce bientôt aux impératifs du design et de la fonctionnalité et s’engage dans une démarche d’artiste pour réaliser des hybrides - sculptures, objets et peintures - dans ses références géométriques et minimales qui sont sa "réponse" originale à sa double racine. Françoise Jaunin lui permet de préciser ici son travail plastique, sa géométrie épurée et une palette réduite à un ou deux tons.
Tout s'exprime chez lui avec par l'importance des gestes et des matériaux de l’artisanat. L'artiste s’inscrit dans la lignée du minimalisme d'Ellsworth Kelly, Agnes Martin ou Marcia Hafif. Mais il y insère une culture duale. Elle se retrouve en toute discrétion là où le travail de la main peut transmettre la confidence de la diversité de manière originale et loin de tout folklore. C'est audacieux et suggére le mystère du feu premier de l'Afrique selon une suite de nœuds rythmiques aussi nuancés que sensibles.
Jean-Paul Gavard-Perret
07:23 Publié dans Culture, Développement durable, Images, Suisse, Vaud | Lien permanent | Commentaires (0)
27/05/2020
Elizabeth Prouvost : jouissance, cruauté et majesté.
Photographe du trouble (racinien ?) Elizabeth Prouvost (ici avec Vanda Spengler) tente de nouveaux rapprochements peut-être plus ou moins cruels mais dans des excès d'amour de princesses infortunées. Passant à la couleur , la douleur se conjugue au plaisir sur des bustes qui se laissent séduire - et leur coeur aussi.
Il y a là une peur et un plaisir, là où tout se joue entre la vie et la mort, l'envie et l'abandon dans un rapprochement qui demeure énigmatique et non dénué de violence au sein de préhensions. La sensualité traduit ce qui tient peut-être de serments et de l'abandon. La poésie devient presque épique en de tels actes de soumission mais peut-être aussi d'une forme d'offrande glorieuse évanescente et charnelle.
Les bustes rappellent une réinterprétation d'une sorte de calvaire. Le péril d'une certaine mort est là. Mais nul ne sait si c'est la grande ou la petite là où tout est grâce et beauté majestueuse dans ces actes esquissés. L'univers reste comme souvent chez Elizabeth Prouvost nocturne mais soudain les couleurs animent les corps offerts dont le voyeur ne saura rien et à dessein des regards pour rendre un tel discours plastique d'une richesse rarement atteinte dans la transe-figuration.
Jean-Paul Gavard-Perret
10:57 Publié dans Culture, Femmes, Images, Suisse | Lien permanent | Commentaires (0)
24/05/2020
Joanna Ingarden-Mouly :décalages
La galerie Esquisse expose pour la quatrième fois les oeuvres de Joanna Ingarden-Mouly. Elle y poursuit sa technique d'aplats et de pans de couleurs auxquels elle superpose désormais des découpes, collages et toujours les griffures qui signent son langage plastique mystérieux et harmonieux mais dans un certain décalage.
En une sensorialité subtile ses superpositions ne sont en rien des excroissances. Une douceur étrange envahit le plan hors sentimentaliste. Car l'artiste reste prudente sur ce plan et refuse certains débordements.
Un tel travail possède le mérite d'apaiser sans édulcorer mais sans forcément rapatrier dans un éden artistique ou sentimental, la beauté demeure essentielle puisqu’elle ouvre le monde à une profondeur particulière en écartant la tentation de la sophistication et du raffinement superfétatoires.
Jean-Paul Gavard-Perret
Joanna Ingarden-Mouly, Exposition du 28 mai au 21 juin 2020, "Esquisse galerie d'art", Rue de Rive 33 - 1260 Nyon
08:17 Publié dans Femmes, Images, Suisse, Vaud | Lien permanent | Commentaires (0)