16/09/2019
Emma Summerton contre toute attente
Emma Summerton, "Landed", Christophe Guye Gallery, Zurich, jusqu'en fin septembre 2019.
La galerie Guye présente la première exposition solo des clichés d'art de la jeune photographe de mode australienne Emma Summerton. Laissant pour l'occasion le léché et l'impeccabilité froide, elle s'ouvre ici à la fantaisie et au décalage pour donner à ses femmes étendues un aspect hors-champ aussi ludique qu'astucieux et moins léger qu'il n'y paraît.
Les codes inclusifs d'une photographie programmée qui réduit la femme à un fétiche ou une usine à fantasmes sont remplacés par ceux que l'artiste crée à la recherche moins de belles images frelatées qu'à celles qui conviennent à un tel propos sans enfumage mais ironique.
Chaque prise démystifie certains ajustements au profit de ceux qui ne sont pas attendus. Ils sont là pour introduire du leurre dans le leurre, les assises sont débôitées là où le corps féminin rentre dans l'image et en sort de manière intempestive. Il devient un indice créateur d’ouverture par l’audace et le résistance de l'écriture photographique. Elle ne fait plus de la femme un simple support mais un manifeste de l’anticonformisme.
Jean-Paul Gavard-Perret
09:16 Publié dans Femmes, Humour, Images, Suisse | Lien permanent | Commentaires (0)
12/09/2019
A sa botte - Sylvie Fleury
Sylvie Fleury, "Chanel Yeti Boots", JRP Editions, Zurich, 13 septembre 2019.
Joignant l'utile à l'agréable, c'est sur toile Denim que Sylvie Fleury lithographie et décline ses "Chanel Yeti Boots", manière de glisser doucement vers la mode d'hiver même si le temps ne semble pas encore propice aux flocons.
Sylvie Feury prouve que la plus belle fille du monde peut donner ce qu’elle a simplement à travers de telles bottes. Quant à celui qui lui fait face (qu’il soit spectateur ou voyeur) il y mêle ses fantasmes, ses grilles de lecture, ses attentes. L'objet peut remplacer la chose. Et ce non sans ironie.
Cette interaction à la fois nie et renforce la force de l’imaginaire en prouvant qu’il ne possède pas une simple fonction d’irréel. L’image affirme sa présence mais comme «n’étant pas toute» dans ses déclinaisons de couleurs et jeux d'angles là où une certaine épiphanie reste neutralisée. Tout reste «en l’état», un état absurde dans l’interminable attente d'une femme possible mais non de sa certitude là où Sylvie Fleury ouvre de la beauté une version particulière.
Jean-Paul Gavard-Perret
22:18 Publié dans Femmes, Humour, Images, Suisse | Lien permanent | Commentaires (0)
09/09/2019
Martin Fuster : foule sentimentale (ou presque)
Des traits de Martin Fuster tout peut être attendu. Le sourire en premier. Mais dans les fantaisies d'un tel artiste rien n'est jamais gratuit et il n'est pas jusqu'aux diagonales du fou trahi sur un échiquier fracturé de tomber dans l'abîme. Et si le dessin montre l'être c'est en passant par les gouffres sans néanmoins que la moindre souffrance soit émise.
En de telles oeuvres les narrations intempestives, en absence de titres, laissent au regardeur le choix de les interpréter. Tout est ici de l'ordre et de la cassure mais demeure dressé dans une impeccabilité graphique. Les petits traits précis comblent autant les vides que le regard. Ce dernier s'abandonne aux ravissements de l'investigation que chaque dessin mérite.
Il y a du Mozart dans les petites pièces que Martin Fuster crée : son langage tranperce, ramasse, pénètre, glisse là où des êtres ronflent sans dormir ou dorment sans fermer les yeux. La foule parfois s'amasse. Mais personne ne parle à son voisin. De quoi rassurer Souchon ou donner les boules à Nougaro s'il était encore des nôtres. En tout état de cause plutôt que d'initier des marches au supplice, l'artiste hache le plaisir parfois en mâchant son crayon ou sa plume.
Jean-Paul Gavard-Perret
L'oeuvre du jeune artiste reste encore méconnue, certains de ses dessins sont publiés dans la revue Folazil (Grenoble).
18:05 Publié dans France, Humour, Images, Suisse | Lien permanent | Commentaires (0)