04/11/2019
Thieri Foulc : étrange rumba du pinceau et du rire
Thieri Foulc est autant érudit qu'iconoclaste. Les plus sérieux parmi nous se reporteront aux travaux de recherche de celui qui fut le "Provéditeur-Editeur Général du Collège de Pataphysique". Pour les autres, et afin d'apprécier le natif de Tataouine, il suffira de se reporter au livre de la collection "Ecrits d'artistes" même si ceux du créateur dépassent cette dénomination.
En effet il s'agit plutôt d'un "écrit-artiste" : l'auteur y troque le pinceau, la brosse et autres ustensiles pour le crayon ou le stylo à billes. Existent donc des projets de non-tableaux, des esquisses descriptives parfois accompagnées de schémas sommaires, des traitements neufs de motifs éculés, etc..
L'humour pince sans rire de "l'artiste" donne à l'imaginaire créatif plusieurs types de plongeons dans le vide. Il est d'ailleurs question de plongeoir dans ce livre puisque dit-il "sa question est fondamentale". Il faut le croire - faute d'images - sur paroles. Ce dont nous nous priverons pas. Et à ceux de Hockney nous préférerons les "bigger splash" de l'histrion farceur. Mais pas que. Il nous enduit non de peinture mais de ce qu'elle suggère puisqu'elle brille (et comme jamais) de son absence. C'est un régal.
Jean-Paul Gavard-Perret
Thieri Foulc, "Peintures non peintes", L'Atelier Contemporain, Strasbourg, 2019, 192 p., 25 E..
15:27 Publié dans France, Humour, Images, Lettres, Suisse | Lien permanent | Commentaires (2)
27/10/2019
Sophie Taeuber-Arp : pour une autre présence.
Suite à son concept "L’homme qui a perdu son squelette" - proposé à Hans Arp, Marcel Duchamp, Paul Eluard, Max Ernst, Georges Hugnet, Henri Pastoureau et Gisèle Prassinos - la Suissesse Sophie Taeuber-Arp, publia le "résultat" (plus que probant) dans les numéros 4 et 5 de sa revue "Plastique", en 1939.
Toutes les oeuvres semblent, tirées des obscurités intérieures où elle préexiste chez l'artiste ou l'écrivain en tant que loi de la nature ou de l'anti-nature par la contemplation du corps indépendamment du principe de la raison.
Les oeuvres prouvent que le style est plus une affaire de vision que de technique. La où le sujet sans squelette ne meurt pas puisqu'il est sauvé par le texte et les images.
Le dynamisme des images comme des textes empêche de s'enfermer dans une structuration admise là où il faut continuer sans la vertébration. La proposition de Sophie Tauber-Arp permit de sortir de la grossière tentation de produire des oeuvres intellectuelles. Tout se ramène à une affaire de sensation là où le sujet ne meurt pas d'absence de vertèbres. Il trouve dans cette nouvelle donne un corpus en attente et sans fin.
Jean-Paul Gavard-Perret
Collectif, "L’homme qui a perdu son squelette", Illustrations de Max Ernst, Fonfroide le Haut, 2019, 48 p., 15 E..
14:52 Publié dans Culture, Femmes, France, Images, Lettres, Suisse | Lien permanent | Commentaires (0)
23/10/2019
Les lieux de stockage de Ralph Bürgin
Le peintre de Bâle Ralph Bürgin laisse émerger des visages comme écrasés et des silhouettes sans profondeur. Que leur surface soit grande ou petite, chaque fois les toiles semblent trop restreintes pour contenir ce qu'elles montrent comme si la figuration y était enchâssée à l'étroit.
L'effet d'étouffement est néanmoins rendu respirable par l'allègement des dessins et des couleurs en ce que l'artiste nomme des "endroits de stockage". La suppression de matière trop épaisse rend les portaits comme transparents.
Dans un certain déséquilibre inhérent aux emboîtements dans l'espace de la toile, jaillissent des nus qui restent indifférents au regard, et les regards des portraits restent eux aussi impassibles.
Tout joue de différents types d'écarts en un travail de reprise et d'interrogation sur des thèmes les plus classiques revisités. Le nu, si souvent féminin, est remplacé ici par le masculin. Il existe là autant d'humour que d'angoisse. Sans que l'artiste n'ait à déplier les raisons de ce déplacement du corps et de la peinture.
Jean-Paul Gavard-Perret
Ralph Bürgin, "La place", du 28 octobre au 8 décembre 2019, C.C.S., Paris.
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