14/12/2020
La peinture autonome de Fabian Treiber
Fabian Treiber, "Painting the Night Unreal", Galerie Mark Müller, Zurich, jusqu'au 19, 2020.
Ni véritablement réalistes, ni complètement abstraites, les oeuvres de Fabien Treiber constituent à elles seules un genre particulier. Le plasticien utilise souvent diverses matières pour créer des compositions dynamiques. Intéressé par les relation entre l'artiste et le médium, le premier veut que son expérimentation des matériaux reste au fondement de sa pratique.
La peinture devient en conséquence à multifacettes. Les surfaces des toiles apparaissent comme possédant une diversité de textures à travers des assemblages qui rappellent ceux de Robert Rauschenberg. Il s'agit pour Treiber de "trouver des images plus que de les créer'" écrit-il et ce afin de tester une nouvelle manière de faire art.
D'abord dessinateur, le "testeur" est de plus en plus peintre à part entière tout en utilsant aussi des formes d'installations. Il utilise autant l'acrylique, l'encre que des résines synthétiques pour atteindre les textures et les tonalités qui fomentent un impact sur le regardeur en ce qui pour lui représente la "pure peinture" (comparable à la "poésie pure" de l'abbé Brémond) capable de créer ce qu'il nomme des "dérangements positifs".
La narration picturale prend un nouveau sens dans le dialogue que l'artiste entretien avec la peinture. Le premier, par la seconde, exprime quelque chose directement tout en créant physiquement des affects que chaque tableau impose par des formes qui se désirent autonomes.
Jean-Paul Gavard-Perret
18:33 Publié dans Culture, Images, Suisse | Lien permanent | Commentaires (0)
13/12/2020
Bruno Stettler et l'Ardente
Bruno Stettler, Corinne, Everyedition, Zurich, 2020
Ce livre est un hommage à la muse du photographe : Corinne (aka Colli, Coco, Acid), avec laquelle il a travaillé de 1980 à 1986. Se retrouvent des scènes "hot" dans diverses parties privées ou publiques. La jeune femme y jouait un rôle majeur. Elle permit au photographe de rencontrer bien des figures emblématiques de la culture et musique pop : David Bowie, Public Enemy, Motorhead et the Beastie Boys entre autres.
Corinne est morte en 2016 à 53 ans. Mais elle ne fut pas seulement une "party girl", une groupie et un modèle. Elle pouvait prendre différentes personnalités. Par ses portraits privés et ses clichés des coulisses des concerts ou de la ville, Stettler capture ses multiples facettes, son personnage cinétique et unique en son genre et son allure de femme fatale.
Elle reste ici bien vivante et telle une galaxie peuplée d'étoiles qui venaient de naître. Le photographe la montre merveilleusement indélébile par delà le temps. Une insouciance remplissait alors des nuits palpitantes dont Stettler ramène le battement lumineux au moment où Corinne en était l'Ardente.
Jean-Paul Gavard-Perret
11:28 Publié dans Culture, Femmes, Images, Suisse | Lien permanent | Commentaires (0)
12/12/2020
Les enceintes vitales de Philippe Fretz
Philippe Fretz, "Tours et enceintes II", In media res, n°11, art&fiction, Lausanne, 2020
Philippe Fretz à travers tours et enceintes trouve un moyen de mesurer le temps, un temps qui n’est plus nôtre mais qu’il faut néanmoins habiter. C'est pourquoi - comme le texte de Matthieu Mégevand qui accompagne ce nouveau numéro de "In media res" le rappelle, elles doivent être majestueuses, imposantes et vastes - surtout en un temps bien présent où nous sommes cloitrés par un virus.
C'est une manière de nous aérer dans des surfaces de verdure (jardin, terrain de golf) si bien que - de facto - de telles enceintes ne nous enferment pas : elles nous protègent du dehors. Dans un jeu de couleurs vives et de structures, Philippe Fretz s'emploie afin que la vie revienne selon une épiphanie d'un genre particulier.
Notre nouveau Warburg (par ses planches où se croisent les époques) doublé d'un créateur original qui rapproche d'un Moyen-Age finissant où Dante rôde. L'inexprimable se réinvente par des géométries en plates bandes parfaitement rehaussées pour fomenter des merveilles. Elles élèvent l'affect par leurs érections aussi douces qu'acidulées. Une unité vitale est tracée derrière des murs qui entourent et ouvrent afin que - de l'enceinte hexagonale d'une Jérusalem descendue du ciel - le soleil et l'agneau premier (de "l'innocence immolée") s'enlacent. Et ce, dans une figuration, partant d'un temps qui ignorait la perspective, rapproche de présences subtilement post-modernes.
Jean-Paul Gavard-Perret
15:14 Publié dans Culture, Genève, Images, Suisse, Vaud | Lien permanent | Commentaires (0)