20/12/2020
Clovis Paul : photographie et contre pouvoir
Né à Vevey Clovis Paul fut d'abord attiré par la recherche historique et documentaire mais se retrouve ouvrier dans l’industrie et la logistique, avant de devenir photographe professionnel en 2012. Il s'intéresse d'emblée aux mouvements sociaux et aux situations des déshérités et il révèle des situations limites qui soulignent bien des ruptures et des antagonismes.
Ses reportages le mènent d'abord à Bruxelles pour montrer le mouvement «No Border», actif envers les discriminations faites aux personnes immigrées et le second sur le squat du Gesù, et le logement de personnes précaires ou déclassées. Se dirigeant vers le phénomène migratoire il va ensuite en Sicile , retourne en Suisse (Lausanne, Chiasso) puis va en France pour montrer le mouvement des "Gilets jaunes" et à Calais où les émigrés demeurent autant en carafe qu'en transit.
Axés sur les mouvements de protestations et après un stage de perfectionnement à l’Ecole supérieure de photographie de Vevey il a conquis de nouveaux outils pratiques et a élaboré des stratégies théoriques propres au champ de l’art conceptuel critique et politique. Il trouve désormais un langage propre à renforcer son travail. La photographie est donc pour lui un contre-pouvoir face à toutes les idéologies qui entretiennent séparatismes et inégalités sociales.
Jean-Paul Gavard-Perret
08:51 Publié dans Culture, Images, Suisse, Vaud | Lien permanent | Commentaires (0)
19/12/2020
Dan Hayon : éloge de la mauvaise photo
La série « Hommage à Paula Rego » est créée à partir d’authentiques mauvaises photos. "Il est important de prendre de mauvaises photos" écrit l'artiste. Il ajoute "elles ont à voir avec ce que je n’ai jamais fait auparavant. L’authenticité est inestimable; l’originalité est inexistante." D'où cette approche d'une forme de collapsologie ou de ravage.
Chacun de ces ratages contient son propre secret sur un secret que l'artiste lui-même ignore. C'est pour cela que leur supposé "plus" nous en apprend toujours moins. L'artiste a modulé ces photographies en des collages dans lesquels l’humour - mais pas la dérision désobligeante - est présente.
C'est une manière - proche du surréalisme et de Ersnt - pour ne pas trop prendre le monde au sérieux. L'artiste lutte contre l'ennui mais pour participer à la décadence de l’homme d’aujourd’hui. C'est dit-il encore "une tâche divertissante et la seule qui m’intéresse". Mais c'est aussi un hommage à la Portugaise Paula Rego qui regarda le monde comme le fait Hayon : à savoir selon une radicalité qui se moque des prétentions à un art classieux et qui veut donner des leçons. Ici c'est au regardeur d'y loger sa propre interprétation.
Jean-Paul Gavard-Perret
Dan Hayon, « Hommage à Paula Rego », 2020, https://hayon.typepad.fr
15:27 Publié dans Culture, Humour, Images, Résistance | Lien permanent | Commentaires (0)
15/12/2020
Chris von Wangenheim : Répulsion et vertige
Pour la création de son esthétique, Chris von Wangenheim noue glamour extrême et de violence en jouant sur deux tendances : le «Film Noir» au cinéma et le «Sublime» dans l’Art. Les femmes y sont fatales, classieuses. Mais existent l'opposition et le décalage entre l’élégance et la décadence de la société privilégiée sous forme d'un sado-masochisme implicite.
Le photographe scénarise, à l'aide de ses images de violence animale ou autres, des peurs et des désirs les plus profonds de la société. Ses prises provoquent toujours un choc entre songe et réalité dans un mixage de crainte et de vénération. Et la photographie de mode - médium apparemment lisse - est soudain comme vérolée par des questions de la violence, de la sexualité et du voyeurisme,
Répulsion et vertige du plaisir sont créés par des photographies de haute couture qui traduisent de manière symbolique l'atmosphère des années 70 et 80 jusqu'à la mort tragique du photographe. Il a toujours su casser l'élan du désir par la présence de la violence. Elle reste pour lui le destin des êtres et de la société.
Jean-Paul Gavard-Perrett
Chris von Wangenheim "Glamour and Danger", The Select Gallery, New-York décembre 2020
10:10 Publié dans Culture, Images, Monde | Lien permanent | Commentaires (0)