05/12/2014
Julia Steiner : îles
Julias Steiner, Galerie Turetsky, Genève, 15 janvier au 21 février 2015.
Abyme de révélation, imprégnation du silence
Craquelures exubérantes venues de grandes alvéoles
Des flots de graphite ou de carbure flottent élégamment
Chaque œuvre est une porte qui s’ouvre,
Un bain de révélation
La dynamique du crépuscule appelle déjà celle de l’aurore
Ça brûle. Un cri profond monte
Plainte première. Mais aussi la fureur d’exister :
Hallucinations nocturnes d’où la lumière jaillit.
Demeurent l’envers, l’en-deçà.
Le souterrain, l’étincelle du refus puis de l’accord impensable.
L’embrouillamini des traces fait autorité.
En des feuilles de route désaccordées : escapade du visible
L’espace sort de sa cage.
Le noir est plein de grâce. C’est un commandement.
Des orvets de marécage surgissent d’un bouillon
D’un galimatias.
Moins de contours que des dedans.
Ils rendent gorge ou plutôt prennent la « parole »
Plénitude. Entropie.
Pas d’arbres ou de fleurs pour saluer le monde.
Juste l’ambition d’une matière noire en fusion.
Silence du corps à l’œuvre.
Chaos et éblouissement
Le noir extrême et vivant.
Rêve, désir, sensation. Attente.
Vésuves et incandescences
Calme, liesse? On ne sait pas.
Jean-Paul Gavard-Perret
08:54 Publié dans Femmes, Genève, Images, Suisse | Lien permanent | Commentaires (0)
Marie Velardi et les frontières
Marie Velardi, Terres-mer et autres œuvres, Gowen Contemporary, nov.-dec. 2014, Genève.
Franchir la frontière : voici ce qui touche à notre plaisir, à notre jouissance et, en conséquence, à nos possibilités d’angoisse puisque nos certitudes se voient interpellées par cette traversée. C’est pourquoi Marie Velardi prend soin pour chacune de ses cartographies et voyages d’atténuer les peurs par la douceur et l’élan de ses formes. L’œuvre crée une sorte de délivrance et aussi une attente. Le regardeur laisse les bagages de sa conscience sur le quai des rationalités et ose dériver au nom d’un franchissement de divers seuils et présences. Preuve que l’œuvre de Marie Velardi vient à bout de la frontière interne de l’être. Demeurent des cartes et des plages dont les dépôts épars permettent de passer la limite de notre ignorance. L’artiste donne “ un passage au passage ” (Roger Munier). Jaillit l’entre-deux où un réel désir n’est plus en sommeil. Les amants de Venise ne finiront pas en cendres. Affleure par effet de lagune la lumière montante et sans frontière. Celle d’une idylle et d’un abandon subtilement programmés par l’artiste. Ses lisières d'aubes accordent à la trame du réel une transe, une flambée d'ivresse où se perçoit toujours une source de vie.
Jean-Paul Gavard-Perret
07:45 Publié dans Genève, Images, Vaud | Lien permanent | Commentaires (0)
04/12/2014
Céline Peruzzo ou l'entrave aux complaisances
Céline Peruzzo, « La scena madre », Milkshake Agency, Genève du 6 décembre 2014 au 18 janvier 2015.
Céline Peruzzo adore l’humour insidieux : une Madame de Staël est remplacée par des ananas et un bel éphèbe grec est renvoyé à sa désolante emphase narcissique digne de la téléréalité. L’image telle qu’elle est pré-vendue abandonne sa part de légende : en reste une vitrine qui éclate en d'autres sortilèges que celui de la simple exhibition. Le tout selon un expressionnisme distancié. Il joue sur un rendu simultané des facettes intimes et publiques. L'intimité ne se remodèle pas selon nature : elle s’enrichit par superposition d'un double jeu. L’artiste ne réduit plus la femme au trophée lumineux : il y a des parapluies pour ça et des mises mettent en scène où l’offre ne répond pas forcément à la demande.
L'image s'introduit dans la faille de l’époque pour faire barrage à son eau dormante comme à son eau bouillonnante. Elle repart de là. Non sans une certaine rouerie dans cette mise en miroir du miroir des apparences. Chaque œuvre de Céline Peruzzo devient un roman, une nouvelle, un cinéma muet. Exit les dialogue de cire et de circonstance. Si bien qu’à sa manière l’œuvre est "militante". Elle apprend à rouvrir les yeux, à ne pas se contenter de jouir des apparences fixées mais de leur traversée. Elle invente des escapades discordantes. Preuve que l’artiste refuse de céder le pas au convenu du tout venant. Une telle approche sonde l’invisible du visible, l’évidence d’un secret qui n’est qu’un leurre.
Jean-Paul Gavard-Perret
07:24 Publié dans Femmes, Genève, Humour, Images, Suisse | Lien permanent | Commentaires (0)