01/04/2017
Torsten Solin : la femme aux miroirs
Torsten Solin «Broken Mirrors», Krisal Galerie, Galerie Christine Ventouras, Carouge, du 4 mars au 1er avril 2017
Pour traquer l’identité, Torsten Solin sait que le portrait univoque ne suffit pas. Il faut le déconstruire afin de percer sa vérité sous le réel et au-delà de l’objectivité de l’image reflet ou miroir. La manière passive et indifférente avec laquelle le miroir « renvoie » l’image n’est donc qu’un croire-entrevoir, d'un fantôme, d'une vue de l'esprit. « Cassant » le support l’artiste déchiffre par diffractions la figure muette qui se multiplie en divers pans de fuite. Le photographe porte l'attention sur le regard et l'échange qu’il entretient avec l’image.
Dans ce processus et ce face à face décalé l’artiste s'éloigne de l’effet de rapprochement et d'identification. La femme n’est plus le miroir des fantasmes et devient porteuse du poids de l'invisible et de l'origine. Elle échappe au temps comme la photographie échappe à une histoire connue. Mais elle crée aussi une brèche ouverte sur un possible : la femme devient l'étrange visiteuse, l'image d'un simple retour qui n'est plus acceptable.
Jean-Paul Gavard-Perret
09:57 Publié dans Genève, Images, Suisse | Lien permanent | Commentaires (2)
27/03/2017
Gisèle Didi : préludes
Plutôt que de cultiver la chimère, les femmes de Gisèle Didi sont telles quelles tout en acceptant les jeux que l’artiste leur impose. Elles séduisent. Ou inquiètent. Ne s’en laissent pas compter sans doute. Et ce même si la photographe fait abstraction des normes voire des convenances - juste ce qu’il faut toutefois - en ce qui tient de préludes à certaines aventures.
Mais les images restent (partiellement) elliptiques pour mieux troubler le regard. Tout est là de manière douce et jamais "sexhibitionniste". Le corps féminin comme sa photographie reste de l’ordre de l’effleurement et de l'humour. Surgit la promesse d'un autre horizon et d'une dérive à la fois photographique et peut-être existentielle. Les images engendrent des ouvertures. Elles offrent un laps temporel au songe et ne le vident jamais de sa substance. Elles permettent de ranimer une présence que l’artiste dirige et dont il ne s’agit surtout pas de se dégager.
Jean-Paul Gavard-Perret
21:50 Publié dans Femmes, Images, Suisse | Lien permanent | Commentaires (0)
André Sanchez : vagabondages
André Sanchez a créé une série de portraits en un assemblage post-photographique de collages, de textures, de poussières colorées, de rayures, d’éléments graphiques et d’autres adjuvants. Ils métamorphosent l’image initiale en la maquillant pour la faire bouger et créer un mystère proche de la picturalité. La beauté des modèles se creuse, prend d’autres angles. Les apparences premières sont mises en porte à faux de manière discrète. Jaillit un monde étrange de superpositions réunies dans une même vibration.
En ce sens, dans l’œuvre, tout commence ou recommence, tout est inlassablement nouveau. André Sanchez offre des présences décalées à la fois plus intimes et plus distantes.. Le littéral s’approche du symbolique là où le portrait semble soufflé sur une vitre pour qu’il deviennent devienne intrigant. Il faut que chaque rencontre soit impossible ou différée afin que la beauté étreigne le sentiment d’une encoche de l’éphémère transformée en hors temps. L’œuvre affirme donc quelque chose qui est moins la nostalgie du sens que la recherche de ce qu’il peut devenir. Il arrive alors que le temps soit transparent, le moi sans épaisseur : un simple regard peut-être avec ça et là une écriture en écharpe.
Jean-Paul Gavard-Perret
09:40 Publié dans Images, Suisse | Lien permanent | Commentaires (0)