21/06/2018
Just Loomis : derrière le rideau
Né en 1957 au Nevada, Just Loomis a commencé sa carrière à Milan en 1983. L’éditeur et galeriste Sozzani lui confie sa première histoire de la mode pour « Vogue Sposa ». L’artiste découvre le monde du « back stage » et la révélation des secrets de la beauté. Il saisit les modèles non en pose mais lorsqu’elles se préparent afin de capter la beauté en "fermentation".
Loomis quitte ensuite l’Italie pour New York où il travaille de manière régulière pour « Harper’s Bazaar » et « New York Times magazine ». En parallèle il poursuit un travail personnel. Ce nouveau livre (impressionnant) devient une sorte de monographie de ses travaux majeurs. Le monde de la mode se transforme soudain en secrets aux couleurs intenses venues d'un surgissement intempestif. L'image crée un seuil visuel particulier et permet de franchir un miroir. Des flammes restent de glace mais des neiges se transforment en brasier. Des fragments d’éphémère permettent d’imaginer. Beaucoup.
Jean-Paul Gavard-Perret
Just Loomis, « Backstage », Hatje Cantz, Berlin, 2018, 28 p., 50 E.
10:05 Publié dans Culture, Femmes, Images | Lien permanent | Commentaires (0)
20/06/2018
Géométrie de la femme dans l’espace : Reine Paradis
Dans « Midnight » la nuit de Reine Paradis est américaine. D’où ce bleu qui se marie au jaune citron au sein de dérives et narrations ludiques, symboliques - peut-être - et surréalistes - certainement - dans une Californie urbaine ou désertique L’univers est comme toujours chez l’artiste géométrique et poétique. Le réel est pimenté de fantasmes.
Les scènes sont construites selon un imaginaire quasi conceptuel. Tout est méticuleusement structuré (couleurs, accessoires, costumes) avec humour. L’univers devient fantasmagorique et demeure une énigme là où pourtant le réel semble saisi de manière brute. La lumière coule sur lui dans une intensité de couleurs violente. L’héroïne habillée (légèrement) de jaune - il remplace de rouge d’autres séries- « claque » visuellement sur le bleu du ciel et dans divers types de mouvements et de prises.
Le spectateur ne peut qu’être émerveillé par une beauté insaisissable et éphémère. Elle forme l'archétype de la féminité dégagée de tout poncif. Ce que la photographie évoque est dynamique, drôle et magnifié par la présence d’une sirène émoustillante et émoustillée par ses propres farces. Elle se moque du réel et soudain la Californie devient une fête. La photographie lui emboîte le pas.
Jean-Paul Gavard-Perret
Reine Paradis, « Midnight », galerie Avenue des Art, Los Angeles, du 23 juin au 30 juillet 2018.
12:28 Publié dans Femmes, Humour, Images | Lien permanent | Commentaires (0)
19/06/2018
Femmes au bord de l’intime - Senta Simond
C’est en référence à la technique du portrait par Eric Rohmer que Senta Simond a intitulé son denier livre de photographie « Rayon vert ». Il fait référence aussi à un procédé optique du même nom. L’artiste propose une vision de la femme selon des angles rarement conventionnels. Pour autant l’objectif n’est pas de choquer mais de produire un effet de beauté particulière.
L’artiste joue d’une forme de connivence avec les modèles. Ce qui lui permet de toucher à leur intimité pour en surprendre l’impeccabilité plastique et non de faire d’élever des châteaux de cartes de fantasmes et de faire croire à une désirabilité complice. Photographier revient à disposer le corps en positions toujours plus incertaines : pour le lire à l’envers, lire ce qui n’est pas dit pour une présence plus prégnante loin de la seule expertise de la chair.
Senta Simond atteint la « choséïté » (Beckett) de poses inductrices de subtilité à lectures multiples. Elles ne s’épuisent pas afin de laisser libre court à un processus ouvert : ce dernier ne cherche pas à convaincre d’une vérité. Le corps tombe autant vers le haut que vers le bas. Il se retrouve en ses poses parfois drôles ou spectrales pour retourner au besoin au natal et l’enfance.
Jean-Paul Gavard-Perret
15:15 Publié dans Femmes, Images, Suisse | Lien permanent | Commentaires (0)