30/08/2020
Valentin Carron et la révision des principes helvétiques
Valentin Carron sort le folklore suisse et le fait exploser - au besoin en reprenant ses fétiches pour les détourner de leur racines. L'artiste né à Fully, vit et travaille à Martigny et à Genève. Il renouvelle le scène artistique au même titre - mais par d'autres voies - qu'Andro Wekua, Mai-Thu Perret ou Vidya Gastaldon. Ses scultpures, ses peintures et ses installations mélangent les genres et renouvellent les stratégies de l'"approriatonnisme" et du "pop-art".
Réinterprétant les symboles familiers de formes vernaculaires il les fait échapper à la culture dominante et le folklorisme par une artificialisation des arts et traditions populaires. Par exemple reprenant les portails en fer forgé chers aux chalets suisses et aux pavillons "Sam’suffit" sur lesquels leur nom est inscrit, il a demandé à un forgeron un même objet mais avec une fausse note. Et ce, en lui précisant d'inscrire en lieu et place des dénominations traditionnels le mot "Authentik" afin d'ouvrir de nouvelles strates de lecture.
Tout devient ambigu et déroutant. Ni authentiques ni kitsch, ni ready-made ou réellement artisanaux, ses objets jettent un doute sur l'authenticité suposée des légendes et des images de la Suisse au moment où les montagnes du Valais échappent aux vaches pour aborder une cultuure plus urbaine et neuve.
Remarqué des ses premières oeuvres réalisées pour le MAMCO et au Centre d'Art Contemporain de Genève puis pour la Kunsthalle à Zurich et le Swiss Institute à New York il a entre autres créé sa célèbre croix monumentale dressée sur la Messeplatz dans le cadre d'Art Basel 2009. Mais ce ne sont là que des exemples des exposition d'un artiste désormais célébré dans le monde entier.
Jean-Paul Gavard-Perret
Valentin Carron , "Zéro Virgule Nul", Consortium Museum, Dijon, du 13 mars 2020 au 18 octobre 2020. "Valentin Caron", texte de Julien Mare, Presses du réel, 2013, 88 p., 35 E.
15:18 Publié dans Genève, Images, Résistance, Suisse, Vaud | Lien permanent | Commentaires (0)
Alain Huck et les chimères
Alain Huck, "Under the Volcano", Skopia - P. H. Jaccaud, Genève, du 3 Septembre au 17 octobre 2020.
Cofondateur de l'espace M/2 à Vevey, Alain Huck est l'un des principaux animateurs de la scène artistique suisse depuis les années 1980. Il pratique principalement le dessin. au fusain. A partir de plusieurs images sources il propose des compositions envoûtantes dans lesquelles le regard voyage et se perd. Mais ses déconstructions ne s'arrêtent pas là. le créateur aborde aussi d'autres médiums : vidéo, peinture, sculpture, installation;
Cette exposition le prouve. l'artiste y scénarise les rapports de la pensée et du corps, l'incommunicabilité entre les êtres, le pouvoir des images ou des mots et ce que leur "chaos" induit. Tout s'organise afin que de l'inconnu rôde dans le réel et ses abîmes de manière incisive mais avec tout un jeu de discrétion. Huck multiplie des incidences dans un monde à la Nick Cave (époque "Stagger Lee"). Là ,tout semblait fait pour l'harmonie mais elle se déglingue.
L'oeuvre devient une méditation par l'action poétique d'une esthétique dont la narration implique une suite de bascules. Pour raboter un introuvable temps, découdre les bourrelets de passages sanglés et veiller à la vie l'oeuvre reste une proue qui lacère de diverses manières les lèvres des marées du réel. c'est ce qui fait la séduction paradoxale d'une telle entreprise.
Jean-Paul Gavard-Perret
09:52 Publié dans Genève, Images, Suisse, Vaud | Lien permanent | Commentaires (0)
29/08/2020
Alexandra Leykauf : la transformation du paysage
Alexandra Leykauf, "Both Sides Now", Villa du Parc, centre d'art contemporain, 12 rue de Genève, Annemasse, du 5 septembre au 20 décembre 2020 et La Nuit remue / La Bâtie - Festival de Genève
Pour son exposition de rentrée La Villa du Parc présente les travaux d'Alexandra Leykauf. Elle y monte un parcours de ses récents travaux autour du paysage. La créatrice dérange les conventions explicites ou implicites du regard masculin qui a toujours monté de tels paysages à travers divers médiums. Tout ici s'irrégularise dans des images autant en réfraction que réfractaires.
Alexandra Leykauf se répappropie de telles images "officielles" et redonne à l'œil une position critique pour offrir une esthétique inédite. Dans ce but elle manipule et approfondit les codes visuels et culturels en utilisant par exemple les peintures des plus grands musées (Corot, Crespy Le Prince, Hodler, etc.).. Ell s'y introduit à travers le prisme d’éléments tangibles de sa perception quotidienne : table de travail, atelier, smartphone....
Sont présents des dispositifs de mixages, de trompe-l’œil, de kaléidoscopes et l’ensemble de ses Faces, "paréidolies photographiques d’une animalité cachée qui affleurerait inconsciemment à la surface des paysages harmonieux et canoniques de l’histoire de l’art". Si bien que le paysage comme objet d'émotion esthétique et de représentation philosophique du monde se transforme afin que nos propres interprétations - grâce aux "schèmes" de l'artiste - prennent le relais.
Jean-Paul Gavard-Perret
10:28 Publié dans Femmes, Genève, Images, Suisse | Lien permanent | Commentaires (0)