31/01/2015
Houellebecq et la photographie
Michel Houellebecq, "Before Landing", Chez Higgins éditions, Montreuil.
A mesure que ses fictions perdent en force, Houellebecq – conscient de cette dilution – passe aux images pour continuer à dénuer le réel. Celui qui ne peut pas se détacher de ses lignes traverse des lieux interlopes sans personne à l'horizon. Nul acteur de vie ne serait-ce qu’un moment. A l’infini d'une parole retournée sur elle-même fait écho l'image vide. Elle épuise le réel où chacun est tombé lorsqu'il était tout petit. Photographier comme Houellebecq le fait ne prétend pas changer le réalité ou en en sortir. Juste contempler les lignes de fuite et les axes majeurs. Preuve que la fuite elle-même est un art lointain. C'est aussi une mise en demeure. Houellebecq ne peut faire autrement. Il s’est condamné à succomber à cette fragilité. Il est coupé du monde même s'il le respire. Il ne le rêve pas. Rêver serait croire voir ce qui se cache derrière. Bien plus que l’espace c’est le temps que le créateur tente de comprendre comme s’il pouvait atteindre un “ temps pur ” qui n’appartiendrait qu’à lui : un temps sans conscience, un temps des premiers êtres. C'est à ce luxe que la société refuse que le photographe s'astreint. Qu'importe si sa force est bloquée et si leur auteur ne cherche pas à théoriser ses images. Elles suivent le langage de la fiction et montre ce que les mots ne peuvent (plus ?) suggérer. Dans le silence de l'image l'écrivain ne peut pas mentir.
Jean-Paul Gavard-Perret
10:16 Publié dans Culture, Images | Lien permanent | Commentaires (0)
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